Il y a des gens qui traversent les prairies sur la Transcanadienne et disent qu’il n’y a rien à voir. Pour ma part, j’ai parcouru des heures et des jours à travers les forêts et les rochers du nord de l’Ontario, du Michigan, du Wisconsin et du Minnesota, et je l’ai trouvé déprimant. Puis les arbres disparaissent derrière moi, la vue de la prairie ouverte à perte de vue s’ouvre devant moi et je suis chez moi!
J’ai passé la moitié de ma vie loin de la Saskatchewan, les liens familiaux m’ont attiré, mais c’est quelque chose de plus que les liens familiaux qui me retient ici. Il y a des choses que les voyageurs ennuyés peuvent ne jamais voir ou expérimenter.
L’ombre sous l’érable du Manitoba dans le coin du jardin de ma mère il y a soixante-dix ans
Le parfum délicat et la beauté des œillets qui poussaient à côté de cet arbre.
L’aigle doré au-dessus de ma tête planait au même endroit pendant plusieurs minutes sans mouvement perceptible de ses ailes.
Le colibri minuscule, les ailes bourdonnantes, flottant à quelques centimètres de mon nez.
Le goût des baies de saskatoon fraîchement cueillis des buissons d’une vallée fluviale.
Les larges vallées sculptées par des eaux tumultueuses qui y ont coulé il y a bien longtemps, maintenant avec seulement un petit ruisseau qui coule au fond de la vallée.
Un troupeau d’antilopes d’Amérique, peut-être le seul animal sur terre capable de distancer un guépard.
Un cerf de Virginie semblant flotter à travers un pâturage, puis flottant sans effort par-dessus une clôture.
L’énorme pierre dans le creux d’une colline, rendu lisse par le frottement des millions de bisons à travers des siècles.
Le premier crocus de printemps apparaissant non loin de cette pierre.
Lys des prairies orange vif qui fleurissent dans les fossés.
Le rouge brillant du sympétrum rubigineux (mallow écarlate) qui pousse près du sol dans les endroits les plus improbables.
Les spectaculaires fleurs de cactus raquettes.
Le chant de la sturnelle, audible au-dessus du bruit de la route et de la climatisation lorsqu’on roule avec les fenêtres fermées.
Le chant de la fauvette jaune.
Un champ blanchi à l’automne par des oies des neiges faisant une pause dans leur migration.
Les conversations bruyantes des grues du Canada depuis un étang à proximité.
Des troupeaux migrateurs de bernaches du Canada, d’oies des neiges, de cygnes siffleurs, de grues du Canada et de quelques zillions de canards.
La sérénade matinale de moqueur roux, imitant les chants de merles d’Amérique et tant d’autres oiseaux.
Le son d’un jeune mâle pic flamboyant battant sur des cheminées et des gouttières en métal au printemps pour attirer un partenaire.
Des hordes de Sympétrum rubigineux (une magnifique libellule avec des ailes de couleur safran), comme de minuscules hélicoptères sillonnant la pelouse à la recherche de moustiques à dévorer.
Le hululement du grand-duc d’Amérique en soirée.
Un jeune grand-duc qui marche solennellement dans la cour, se penchant de temps en temps pour manger une sauterelle.
Ses ailes massives qui se déploient lorsqu’il vole vers un poteau pour voir plus loin.
Les longues journées d’été.
Couchers de soleil spectaculaires.
Après un long hiver, voir le paysage aride à se transformer en une verte vibrante et luxuriante.
Eh bien, à chacun son bercail. Pour quelque raison je préfére mes grands érables de l’est. Ce n’est pas pour dire que je ne suis pas amateur des prairies, non plus.
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